The winner takes it all.

Cette semaine ne s'annonçait pas des plus concluantes. Je me sentais lourd, j'étais fatigué et rien ne semblait fonctionner comme je l'aurais souhaité. J'avais l'impression que les divinités se moquaient de moi, qu'elles me narguaient. Comme pour ne pas aider, le temps à l'extérieur était des plus désagréables; l'une de ces journées nuageuses, fades, ennuyantes. On aurait dit que tout avait été repeint de gris. Je ne m'étais jamais senti à mon aise, dans ce lycée, dans le dortoir, dans les classes. Je me rendais compte une fois de plus comme le Japon me manquait encore, tout compte fait. J'avais hâte de pouvoir retourner chez moi, que le week-end soit là et que je puisse ne rien faire si ce n'était que prendre du temps pour moi pendant ces deux journées. Le lycée me lassait horriblement. Je n'avais aucune idée de ce qui m'arrivait cette semaine, je me sentais si... Étrange. Mais bon, que pouvais-je y faire, honnêtement? Pas grand chose. Tout ce qu'il me restait à faire était... de m'en foutre, comme d'habitude. Comme toujours. Je n'étais bon qu'à ça après tout. J'hausse les épaules, je ferme les yeux et le problème est réglé. C'est si simple, vivre ainsi. Tellement plus convenant aussi. C'est un mode de vie auquel on s'habitue particulièrement vite... Mais si facile à briser, aussi. À réduire en miettes d'une seconde à l'autre. Je l'avais appris à mes dépends, ce lundi. Probablement le lundi le plus horrible qu'il m'ait été donné de vivre depuis longtemps. Mais c'était déjà du passé et ça ne comptait plus, à présent. À quoi bon ressasser les mauvais souvenirs? Souvenirs futiles, souvenirs sans importance.

Ce matin encore, pour une raison inconnue, je m'étais levé de mon lit. J'aurais mieux fais d'y resté, comme toutes les autres journées précédentes. Vêtu d'une chemise rouge et d'un pantalon noir, je m'étais rendu jusque dans la cour, songeant toujours à la possibilité de retourner à ma chambre au dortoir et ne plus en sortir. Je soupirai et, réalisant que ma motivation pour aller en cours s'élevait à zéro, j'optai plutôt pour l'option de sécher. Je n'avais pas vraiment l'habitude de le faire, ou alors que très peu, mais il m'arrivait de le faire de temps à autre, tout comme aujourd'hui apparemment. Je me rendis à l'intérieur du lycée et prit le chemin afin de me rendre jusqu'au toit; cette fois-ci, cependant, j'avais évité de prendre l'ascenseur. J'avais appris de ma leçon et je n'y retournerai plus jamais, à moins d'être avec Luke.

Les cours n'avaient pas encore débuté alors j'avais encore une marge de manœuvre avant de me faire prendre. J'arrivai à me rendre jusqu'au toit sans problèmes majeurs et je m'approchai du bord. L'air était meilleur ici. Je fermai les yeux un instant avant de me laisser glisser contre la clôture qui faisait le tour du toit. Je sorti de mon sac mon éternel cahier à dessin. Ici j'aurai la paix, ici personne ne viendra me déranger. Je pouvais faire ce que je voulais. Je me mis à gribouiller sans trop réfléchir à mes mouvements, persuadé que personne ne viendrait me déranger... Quel euphémisme.

J'entendis la cloche annonçant le début des cours résonner au travers du bâtiment et levai la tête un instant. Voyant que personne ne venait, je reportai mon regard vers mon cahier. Une silhouette se formait au travers des lignes.

Puis, alors que j'étais concentré par ce que je faisais... Un bruit me fit relever la tête de nouveau, soudainement. Non...

La porte. C'était la porte qui s'ouvrait. Quelqu'un arrivait. Merde.

Messages : 12 Date d'inscription : 13/06/2014

C’était une journée morne où le ciel était gris et où les oiseaux ne chantaient guère. C’était une habituelle journée de la ville de Versailles. Ville où j’ai emménagé à ma majorité pour avoir plus d’air et mettre plus de distance entre moi et ma famille. Dans ce petit et éternel appartement qui représentait ma prison, n’ayant qu’une unique fenêtre pour aérer un peu l’air qui devenait de plus en plus étouffant et irrespirable. L’air de la monotonie et l’ennui total qui s’infiltrait dans mes organismes et m’arrachait les poumons. Je me suis encore une fois tiré de mon lit avec profonde lassitude, allumé une cigarette et fumé distraitement pendant que je me lissais la frange. J’écrasai le mégot, enfilai un pull rayé, un slim noire soutenu par une ceinture à pics ainsi que des docs. Je devais faire attention à ne pas m’habiller d’une manière trop « immature » pour ne pas passer pour un adolescent moi aussi. Toutes les règles du lycée m’énervaient. Mais jusqu’à ici je n’avais pas rencontré de grands problèmes. J’ai pu gronder plusieurs lycéens et ça me remontait le moral atrocement. Ça me rend vraiment heureux de pouvoir faire ça chaque jour. Oui, j’ai un peu trouvé ma joie dans le malheur des autres et alors, c’est eux qui ont fait le miens, je ne fais que leurs rendre la monnaie de leurs espèces. J’eus le temps de prendre tout mon temps en prenant le petit déjeuner avant de sortir pour une nouvelle journée de travail. C’était plutôt bien payé alors je ne regrettais pas, les premières semaines n’avaient pas très mal passé comme je viens de le dire, c’est plutôt « cool ». J’ai même réussi à ne pas trop trembler en approchant un élève. J’ai reçu un appel de ma mère, hier, elle me félicitait d’avoir trouvé un travail même si mon choix la surprenait un petit peu. Je l’ai rassuré, j’ai réussi à le faire. Je suis fier de moi. Aujourd’hui, je me sens un peu mieux.

Je faisais ma tournée habituelle pour voir si des élèves n’avaient pas rejoint leurs cours et apparemment tout le monde était bien à sa classe. Sauf quelques rebelles que j’ai eu le plaisir de gronder sur mon chemin. Une fois mon travail fait, j’eu envie de fumer un peu. Pour ça il ne fallait bien sûr pas qu’on me voit. Alors je me suis décidé d’aller à mon endroit préférer dans ce lycée, le toit. J’ai toujours aimé cet endroit car on pouvait être au calme mais aussi observer les autres de loin. Même si l’appel du vide m’interpelle souvent quand je suis de son haut. Je m’allumai une cigarette en montant les marches deux à deux pressé de rejoindre le toit. J’ouvris la porte et sans regarder autour de moi je marchais en ligne droite. Je pris une grande inspiration, inhala la fumée qui se répandait dans mes poumons. Je retournai légèrement la tête et contre la clôture se trouvait un garçon. Petit, brun, sûrement asiatique habillé d’une chemise rouge. Je grimaçai ne voulant abandonner ma cigarette je la pris entre mes doigts la laissant se consumer d’elle-même tandis que je m’accroupis face au garçon. Je le fixais sans grande gêne. J’avais un sentiment de déjà vu mais je ne sais pas trop. Bon, après tout, des gamins y’en avait des milliers dans ce lycée hein. Je baissais la tête et mes cheveux suivirent le rythme. Regardant son dessin, j’eu un sourire pendant deux secondes ;

-Oh, ça me ressemble. C’est un joli dessin.

Je me relevai ensuite et lui fis signe de se lever. La cendre de ma cigarette retombait à terre au moindre de mes gestes. Je lui demandais par la suite presque machinalement ;

-Nom, prénom, classe.

Je m’adossais contre l’inox de la clôture et finalement et contre cœur lâchait ma cigarette et l’écrasait du pied. Je cherchais en mémoire et dans mes souvenirs le visage du garçon, et je le reconnus ensuite.

J'avais entendu un bruit, j'avais entendu la porte. Mon premier réflexe fut plutôt imbécile maintenant que j'y songeais; reporter mon attention sur mon cahier, me faire silencieux et espérer que la personne ne me remarquerait pas. C’était idiot mais c’était déjà mieux que de paniquer et me jeter dans son champ de vision. Aussitôt dit, aussitôt fait, je me replongeai au travers des lignes tracées sur la feuille de mon cahier à dessin. J’entendis des pas se rapprocher, lentement, mais ne relevai pas la tête pour autant. L’odeur de fumée me parvint jusqu’aux narines et je retins un toussotement. Peut-être était-ce un élève, qui sait… Je ne connaissais pas beaucoup de professeurs qui se donnaient la peine de monter jusqu’au toit. Ça m’arrangerait que ce ne soit ni un professeur et ni un surveillant. Je n’avais pas particulièrement envie de m’apporter des problèmes inutiles, ni que mes parents finissent par être au courant de cet… ‘’Acte de rébellion’’. Mes parents étant déjà plutôt stricts, s’ils venaient à l’apprendre, je pouvais sérieusement commencer à avoir peur. Bon, ils ne me donneraient pas la fessée ou un truc ridicule comme ça, mais je m’imaginais déjà le genre de discours long et ennuyant concernant mon avenir, qu’en agissant ainsi je ne prouvais que mon manque de maturité et que je n’arriverai jamais à rien plus tard… Oui, ils étaient ce genre de parents à s’imaginer un bel avenir parfait et lumineux à leur enfant. Ils s’attendaient sûrement à ce que je me lance dans la médecine et que je devienne un des plus réputés de la ville, les connaissant… Malheureusement pour eux, j’en doutais fortement. De toute façon, ce genre de clichés m’ennuyaient au plus haut point. Je me voyais mal en faire mon avenir comme eux l'auraient souhaité. D'ailleurs, je n'avais même pas la moindre idée du genre de métier dans lequel je pourrais me lancer...

Je soupirai silencieusement en continuant mon gribouillis, comme si j'avais complètement oublié la présence de l'autre. La silhouette sur la feuille s'ajustait et devenait de plus en plus claire. Les lignes l'affinaient peu à peu. Et soudainement...

- Oh, ça me ressemble. C’est un joli dessin.

...Cette voix...
Je relevai la tête lentement. Ce visage. Je le connaissais. Je sentis la rage que j'avais ressentie la dernière fois dans l'ascenseur se mettre à bouillir au fond de moi. Calme-toi Hinata. Il ne semble pas te reconnaître.

- ... Merci.

Il se releva et je fis de même. Je venais vraiment de m'enfoncer dans la merde et dans toutes les personnes qui avaient pu me trouver, il fallait que ce soit lui. Je priai intérieurement pour qu'il ne me reconnaisse pas, sinon je sentais que... Qu'il n'allait sérieusement pas être clément avec moi.

- Nom, prénom, classe.

Je soupirai longuement témoignant mon mécontentement, en ramenant ma frange vers l'arrière. Je rangeai mon cahier dans mon sac et fourrai mes mains dans les poches de mon pantalon.

Je fixai l'homme dans les yeux un instant. Il me semblait légèrement différent de la dernière fois, je n'aurais su dire pourquoi. Il avait un air beaucoup plus... confiant. Il devait jubiler à l'idée de prendre un soit-disant ''délinquant'' (ce que je n'étais pas) sur le fait. Un ''délinquant'' qui se poste sur le toit pour dessiner en paix. Ça fait si peur...

En continuant de le fixer, je répondis en prenant la peine de ne pas être trop froid afin de ne pas me traîner davantage dans les problèmes;

- Nakajima Hinata, 2ième A.

Prenant mon sac en main, je détournai le regard. Il ne fallait vraiment, vraiment pas qu'il me reconnaisse. Je me grattai la nuque et reportai mon regard vers lui, l'air neutre.

- Alors? Que comptez-vous faire, monsieur? demandais-je en appuyant sur le monsieur. Je me suis foutu dans la merde, hein? 'Fait chier... J'entend déjà le discours ennuyeux de sermon de mes parents.

Je soupirai en souriant en songeant à l'idée du siècle que j'avais eu, d'aller sur le toit. J'aurais simplement dû quitter le lycée, ça aurait été tellement plus... simple.